lundi 1 novembre 2010

Lire! Pour refuser la dictature médiatique (2)

Le roman (comme toute la culture) se trouve de plus en plus dans les mains des médias ; ceux-ci étant agents de l'unification de l'histoire planétaire, amplifient et canalisent le processus de réduction ; ils distribuent dans le monde entier les mêmes simplifications et clichés susceptibles d'être acceptés par le plus grand nombre, par tous, par l'humanité entière. Et il importe peu que dans leurs différents organes, les différents intérêts politiques se manifestent. Derrière cette différence de surface règne un esprit commun. Il suffit de feuilleter les hebdomadaires politiques américains ou européens, ceux de la gauche comme ceux de la droite, du Time au Spiegel ; ils possèdent tous la même vision de la vie qui se reflète dans le même ordre et selon lequel leur sommaire est composé, dans les mêmes rubriques, les mêmes formes journalistiques, dans le même vocabulaire et le même style, dans les mêmes goûts artistiques et dans la même hiérarchie de ce qu'ils trouvent important et de ce qu'ils trouvent insignifiant. Cet esprit commun des mass media dissimulé derrière leur diversité politique, c'est l'esprit de notre temps. Cet esprit me semble contraire à celui du roman.
 L'esprit du roman est l'esprit de complexité. Chaque roman dit au lecteur: "les choses sont plus compliquées que tu ne le penses." C'est la vérité éternelle du roman mais qui se fait de moins en moins entendre dans le vacarme des réponses simples et rapides qui précèdent la question et l'excluent.


Milan Kundera, L'art du Roman, (Partie 1)

Lire! Pour refuser la dictature médiatique (1)

Ce que je reproche aux journaux, c'est de nous faire faire attention tous les jours à des choses insignifiantes, tandis que nous lisons trois ou quatre fois dans notre vie les livres où il y a des choses essentielles.

in Proust, Du côté de chez Swann 

De nos jours, "Propagande", ça se prononce "Communication" ou "Pub", 
mais dans les deux cas, il s'agit bien d'un message s'adressant au peuple 
et soutenant un régime ou un système.
Du coup, le résultat sur les esprits est le même.

Mais combien de fois un citoyen médiatisé entend-t-il parler de "com' " dans sa journée?
On ne devrait jamais sous-estimer l'importance de nos pensées et de nos idées. 
Ce sont des germes terrifiants.
Il suffit de répéter plusieurs fois une phrase pour la rendre vraie. 
Un jour les plantes qui poussent dans les esprits finissent par se déverser sur le pavé, inondant la voie publique. Et tant mieux, au fond.

Extrait de "Rêverie sur ta venue" de Guillaume Apollinaire

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Dans la chambre de volupté

Où je t'irai trouver à Nîmes
Tandis que nous prendrons le thé
Pendant le peu d'heures intimes
Que m'embellira ta beauté



Nous ferons cent mille bêtises
Malgré la guerre et tous ses maux
Nous aurons de belles surprises
Les arbres en fleur les Rameaux
Pâques les premières cerises



Nous lirons dans le même lit
Au livre de ton corps lui-même
- C'est un livre qu'au lit on lit -
Nous lirons le charmant poème
Des grâces de ton corps joli



Nous passerons de doux dimanches
Plus doux que n'est le chocolat
Jouant tous deux au jeu des hanches
Le soir j'en serai raplapla
Tu seras pâle aux lèvres blanches


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